Installation

Reila pénétra dans la salle qui serait désormais sa salle de classe. Ce n'était pas la première fois qu'elle donnait des cours, mais avec autant d'élèves d'un coup, elle avait peur de ne pas y arriver. Il lui faudrait vaincre sa timidité.

La violoniste resta figée dans ses pensées un moment et se décida à jeter un coup d'oeil. La salle était de dimensions respectables longue et très eclairée. Toute la première partie était occupée par un piano et les bureaux des élèves. La seconde partie était vide. A elle de la remplir. Reila avait prévu des xylophones et d'autres instruments que l'on trouvait dans toutes les salles de musique. Certains pouvaient être récupérés des années d'avant mais Reila avait dû commander de nouveaux instruments. Et ce matin-même, une secrétaire lui avait signifié que les instruments étaient arrivés. La jeune femme se déposa son violon et son étui près du piano.

*Et maintenant, il me faut tout installer. Cela va être bien lourd...Peut-être que quelqu'un pourrait m'aider ? *

Reila ouvrit la porte et jeta un coup d'oeil. Personne dans le couloir qui pourrait être réquisitionné...Et même si un malheureux s'était trouvé là, elle n'aurait jamais eu le courage de lui demander de l'aide. Elle claqua la porte, se remonta les manches et pensa qu'il était temps de se mettre au travail.

Reila était toujours plongée dans ses pensées. Elle songeait à tout le travail qu'elle devrait abattre. Et elle songeait aussi que du temps où elle était la grande Reila Nita, la violoniste prodige, elle aurait eût du personnel pour s'occuper de ceci. Mais maintenant, ce temps était révolu et elle allait devoir affronter cette masse de travail seule. Après tout ce n'était pas plus mal ainsi. Elle voulait ce changement de vie...et ce n'était pas quelques kilos à monter qui allaient la décourager.
Mais la violoniste s'arrêta brusquement au milieu de la pièce lorsque la porte s'ouvrit. Elle manqua de s'emmêler les pieds et détailla le nouvel arrivant. C'était un jeune homme, avec des cheveux noirs. Un élève à en juger son uniforme. Dernière année selon elle. Elle sourit brèvement.

Le nouvel arrivant s'adressa à elle.

- Yo!

Reila fut estomaquée par la désinvolture du jeune homme et ne lui répondit pas immédiatement. Allez, il fallait qu'elle se ressaisise. Si la timidité reprenait déjà le dessus quand elle était face à un élève, qu'adviendrait-il devant toute une classe ?

- Peut-être avez-vous besoin d'aide?

La jeune femme prit une grande inspiration et regarda l'élève de toute sa hauteur, ce qui n'était pas grand chose.

-Et bien...Voyez-vous...Je...Je...Oui, j'aurai besoin d'aide...Si cela ne vous dérange pas.

Reila se sentait ridicule. Elle était incapable de dire une phrase d'affilée. Mais qu'est-ce qui l'avait prise d'accepter ce poste ? Pas le moment de se laisser décourager, elle pouvait le faire !

-Il faut...que je monte tout les nouveaux instruments que j'ai commandé...Je suis Reila Nita...La nouvelle professeur de musique...Et...A qui ai-je l'honneur ?

Reila soupira. Ces craintes étaient confirmées...Personne ne la prendrait jamais pour une prof. Mais qu'avait-elle fait pour mériter cela ? Allez, il fallait qu'elle fasse preuve d'un peu d'autorité et repris un masque froid.

-Effectivement, je suis votre nouvelle professeur de musique. Mais votre ancienne professeure est partie avec ses instruments. J'ammène les miens. Je ne crois pas que vous appréciriez de jouer sur des instruments invisible, n'est-ce pas ?

Elle soupira. Elle avait été glaciale. Mais était-ce la bonne méthode ? La violoniste savait pertinemment qu'elle ne serait jamais appréciée de tous, loin de là...Mais si elle pouvait se rendre sympathique aux yeux de la majorité de ses élèves. Non, ce n'était pas gagné pour Reila. Mais elle n'allait pas baisser les bras dès la première difficulté et continua, d'un ton plus chaleureux.

-L'accordéon ? Je n'en ai jamais joué. Mais j'en ai souvent écouter jouer. On jouait souvent ensemble.

Elle cligna des yeux, comme pour chasser des larmes invisibles et s'empêcher de pleurer. Souvent, les rares bons souvenirs de cette époque lui remontaient et la rendaient nostalgique. Elle devait avoir l'air ridicule face à ce garçon, qui semblait très sûr de lui. Peut être qu'en effet, elle n'était pas faite pour le boulot de prof. Mais la jeune femme détestait penser à cela et continua d'un ton un peu tremblant:

-Aurons...Aurons-nous le plaisir de vous...de vous entendre jouer en cours de musique ?