Averse ou pas averse ? [PV Temi]

C’est au son de Good Charlotte que Nobuo s’assit sur le toit. Il était quelque part dans les derniers étages du bâtiment quand une dévorante envie de prendre l’air s’était manifestée. Il aurait pu, en effet, allé dans le parc, mais traverser tout le lycée, non merci. Le toit n’est pas si loin, Nobu s’échoua dessus en silence. Il posa le turquoise de ses yeux dans les nuages de cette fin d’après-midi. Le ciel était gris, annonçant une averse. Tant mieux, il resterait là un bon moment, Nobu aimait bien la pluie. M’enfin, avec la chance qu’il avait aujourd’hui, il aurait juste droit à un sal gros nuage noir et rien d’autre. Fait ch*er.
Nobu sortit machinalement un paquet de cigarettes de sa poche et en porta une à ses lèvres. Il s’amusa plusieurs secondes avec avant de l’allumer, il eut alors le plaisir de la voir s’éteindre une fraction de secondes après. Le temps était humide. Avec un effort colossal pour résister à la tentation de balancer son briquer quelque part dans la cours, le professeur réessaya trois fois avant que la cigarette daigne s’allumer.
Il s’assit en tailleur et arrêta son lecteur MP4. Après une journée de cours, il avait plus que besoin de calme. Nobu aimait bien enseigner, quoiqu’il dise. Ca lui rappelait sa jeunesse, les conneries qu’il faisait avec ses potes pour pourrir la vie des profs, le bon temps. Il s’étira paresseusement avant de s’allonger, les bras croisés derrière la tête, pas pratique pour fumer. Il bascula donc sur le côté…C’est déjà mieux. Mais il ne voyait plus le ciel, la vie était vraiment mal foutue…

Temi avait un peu de temps libre... à sa façon. Finalement, son indécision la mena au toit. Même si le temps était à l'averse, tant pis. La pluie ne la gênait pas plus que ça. Sauf quand elle tombait lorsqu'elle voulait fumer une cigarette. Là, c'était un peu plus problématique. Arrivée devant la porte qui menait donc là où elle se rendait, elle fit quelque chose... d'intelligent. Elle alluma sa clope avant de sortir, même si cela était formellement interdit. d'ailleurs, fumer sur le toit aussi était interdit, mais elle s'en fichait éperduement.

Elle poussa ensuite les lourdes portes... Et aperçut son... cher professeur de biologie allongé là. Elle fronça les sourcils et songea un instant à faire demi tour. Mais elle se voyait mal faire demi tour, la clope au bec dans tout le lycée. Et puis, il suffisait de l'ignorer, aussi impoli que cela paraisse. Elle le dépassa donc afin de se trouver à une distance raisonnable puis elle s'adossa au muret. Instinctivement, son regard violet se porta vers le cieux, dont les caprices ne devraient pas tardés à s'abattre sur le lycée. Quel temps... Aussi étrange que cela puisse paraître, cela lui ressemblait, un peu. D'un gris constant, mais qui pourrait laissert passer une éclaircie ou encore se foncer un peu plus. La pluie... C'était une autre affaire. Elle soupira, tira une longue taffe de sa cigarette.

Puisqu’il ne voyait pas le ciel, Nobu en était réduit à regarder les pavés. C’était moins distrayant. Il entendit le bruit des portes. Mais c’est pas possible ça ! Il avait fait exprès de venir sur le toit pour avoir la paix. Il finit par lever la tête pour voir, par dessus son épaule, le ou les malheureux qui venaient troublaient ses moments de paix. Ce n’était ni le, ni les mais la malheureuse. Décidément, elle faisait tout pour le contrarier celle-là. Comment elle s’appelait déjà ? Nobu se redressa donc, pensant qu’elle viendrait lui taper la discut’ – comme disent les jeunes. Il n’aurait jamais songé, voyez-vous à ce qu’elle réagisse comme elle l’avait fait.

Incrédule, il la regarda lui passer à côté, le dépasser, s’asseoir un peu plus loin. Mais elle est en train de me… L’expression de son visage devait être bien distrayante. Non mais vraiment…Nobu écrasa sa cigarette à moitié commencée sur le sol, désolé ma belle. Un autre professeur, peut-être, aurait été scandalisé par ce manque d’éducation. Mr Odaga, lui, ne supportait pas d’être ignoré de la sorte et surtout pas par une petite c*nne. Il se leva, rangeant vite fait son lecteur MP4 dans la poche de son jean.

« Eh ! Temi ! »

Il vint s’asseoir à côté d’elle. Elle voulait jouer au sans gêne ? Il avait déjà gagné, au moins dix ans plus tôt. Na. Puis, un des gestes rapides et précis qu’il resservait aux expériences, il attrapa la cigarette qui dépassait des lèvre de la jeune fille pour la mettre entre les siennes et se leva juste après. Au cas où elle ait le cran de la reprendre, et il n’en doutait pas. Avec un sale sourire, il tira une bouffée de nicotine.

Au fond, il l’aimait bien, la petite Temi. Il préférait de loin les élèves qui lui tenaient tête à ceux qui baissaient les yeux sans résister. Au fond, peut-être qu’en les faisant ch*er comme il le faisait, il cherchait juste à les forcer à réagir. Qui sait ? Il reporta soudain son attention sur la petite Temi…Tiens, il lui allait bien ce surnom. Il prit la cigarette entre ses doigts et la retira de sa bouche.

« Désolé, j’ai écrasé la mienne sans faire exprès. »

Il observa la cigarette avec intérêt avant de la remettre entre ses lèvres. Il avait un peu mentit. « Sans faire exprès… » Temi ne serait certainement pas dupe, elle n’était pas si bête. C’était vraiment méchant, maintenant qu’il y pensait, l’histoire de l’exposé sur le…Le quoi déjà ? La bestiole là…Non, ça ne lui revenait pas. Il sourit. Être prof, c’est le job le plus cool qu’il ait jamais eut.

Temi haussa un sourcil afin de cacher son... ressentiment. Pourquoi diable venait-il la faire ch*er alors qu'elle s'était installée tranquillement? Pire! Il lui avait ''emprunter'' sa cigarette... Là, ça n'allait pas, mais alors pas du tout. C'est pas comme si elle était riche. Déjà que ton son fric passait dans les clopes, ou presque, il manquerait plus qu'on les lui taxe. Elle se leva, et reprit l'objet de ses droits -même si ce n'est pas vraiment le cas, puisqu'elle n'a pas le droit de fumer en ces lieux...- avec un vivacité étonnante. Elle fit ensuite un bon pas en arrière, afin de mettre sa clope à l'abri et accessoirement, toiser son vis-à-vis. Elle se permit de tirer une longue latte. L'appel de la nicotine l'emportait largement sur un éventuel dégoût qu'elle aurait pu éprouver sachant que son prof de biologie avait tiré sur sa clope.

Elle se força à employer un ton froid et distant, ne laissant rien paraître de ses émotions afin de faire savoir son point de vue au professeur:

-Il me semble que Maeda est un homme plutôt généreux. Allez donc vous chercher une autre cigarette, Ogada-sensei.

Il était vrai que le directeur du lycée s'arrangeait toujours pour que les professeurs soient mieux payés ici que dans une école privée quelconque. Il était plus vrai encore que Temi n'avait plus une thune. Donc, pas question qu'on lui vole ses clopes comme ça, sans aucun gêne et avec pour seul prétexte une excuse... bancale. Si il était irriter de la venue de la jeune fille aux cheveux violets au point d'en massacrer une clope, il pouvait toujours s'en aller. Et la miss s'en porterait que mieux. Mais pour une raison qui lui était inconnue, Temi était sûre que le professeur n'avait pas l'intention de s'en aller. Pire: il prendrait un malin plaisir à la rendre chèvre... ou tout du moins, essayer. Souhaitons lui bien du courage. Quoi que... Temi en aurait plus besoin, visiblement.

Temi retint donc un soupir, et vrilla -pour la première fois- ses grands yeux violets dans les prunelles turquoises de son interlocuteur. Un air de défi? Pas vraiment. Le regard de Temi était à la fois si neutre et si intense qu'il était difficile d'y déchiffrer quoi que ce soit. Voire, impossible. Seules certaines émotions forte pouvaient se lire lorsqu'elle perdait son calme. La peur, par exemple, s'inscrivait très bien dans son rager. La détermination aussi. Il arrivait même qu'à de rare occasions, ses prunelles s'assombrissent de colère. Mais tout ceci était bien rare, et elle ne laisserait pas un professeur, quel qu'il soit, lire en elle. Farouche? Elle l'était. Sûre d'elle? Peut être. Solitaire... Il n'y avait que ça de vrai. Elle refusait compassions et intérêts, pour s'enfermer dans un faux égoïsme dont elle n'avait aucune envie de se libérer. Pour le moment.

C’était rare les filles aussi peu expressives que Temi, qui ne laissaient rien paraître, Nobuo trouvait cela absolument déconcertant. Pas même un petit signe d’agacement, rien de quoi se moquer, il ne pouvait même pas évaluer le niveau de colère de Temi. Bah, il verrais bien jusqu’où il pouvait la pousser. Lui, il ne chercha pas à cacher la surprise lorsqu’elle reprit sa cigarette. Si seulement elle était aussi vive pour faire ses devoirs…En tout cas, il avait réussi à la faire reculer et ça c’était pour Nobu un signe de victoire, il ne chercha pas non plus à le cacher. Il afficha un air largement supérieur qui était ceci dit déplacé puisqu’il c’était fait reprendre la cigarette…Il ignora la réplique de Temi pas parce qu’il ne trouva rien à répondre, mais parce qu’il était déjà parti sur autre chose en la voyant s’empresser de tirer une taffe.

« T’es complètement accroc dis donc, ma jolie. »

C’était l’hôpital qui se foutait de la charité. Quoique Nobu était certainement moins dépendant que son élève, il fallait dire que, comme elle l’avait si bien sous-entendu, pour lui, un paquet de cigarettes, ça ne valait pas grand chose. C’est à ce moment que Temi commit l’imprudence de flanquer son regard dans celui de son professeur. Il prit soin de ne pas baisser les yeux et de fixer ses prunelles violettes insondables. A croire qu’elle ne ressentait rien. Une des idées géniales traversât l’esprit tordu de Nobuo.

« Mais…J’y pense. Fumer, c’est pas interdit sur le toit ? »

Elle avait du cran, la petite Temi, ça plaisait à Nobu. Scientifique de nature, il mourrait d’envie de savoir jusqu’où elle irait, au fond c’était une expérience bien distrayante. A vrai dire, il ignorait aussi jusqu’où lui-même pourrait aller. Une chose était sûre, c’est elle qui craquerait. Il avait déjà gagné, il en était sûr. Son regard malicieux toujours planté dans les grands yeux de Temi, il fit un pas vers elle, pendant que ses lèvres faisaient grandir le sourire plein de triomphe né quelques secondes avant.

« Ce n’est pas le genre de chose… »

Il marqua une courte pause, le temps de s’approcher encore un peu plus. Au fur et à mesure qu’il avançait, ses paroles se changeaient en murmure, un magnifique décrescendo qui avait déjà fait son effet. Il doutait qu’il arriverait à la faire craquer comme ça, mais c’était un petit pas de plus. En parlant de petit pas, lorsqu’il jugea qu’il était assez prés de Temi pour qu’elle puisse entendre un murmure, il susurra.

« …qui mérite un devoir supplémentaire ? »

Il espérait, là, taper dans quelque chose de sensible. Il lui avait déjà donné quelque chose à faire, en classe, peu de temps avant, et sa réaction avait été – du point de vue de Nobu – plus que satisfaisante, puisqu’elle avait quitté le cours. Qu’est ce qu’elle ferait, cette fois ?

Temi haussa un sourcil. Elle trouvait le comportement de son professeur... Puéril. Enfin, elle ne répondrait pas à la provocation. Elle ne prit pas la peine d'ailleurs de reculer sous la menace. Mais s'il continuait à donner des devoirs à tours de bras, elle ne se gênerait pas pour déserter définitivement son cours... et tant pis pour son année. Il y avait des limites à ce que pouvait supporter Temi, mine de rien. Et oui, elle était accro... et alors? En quoi cela pouvait-il intéressé un prof? A moins qu'il ne veuille lui offrir une cartouche de Lucky Strique pour son noël, elle ne voyait pas en quoi cette information pouvait se montrer utile en quoi que ce soit.

Elle leva donc les yeux vers Nobuo -qui était plus grand qu'elle- et aussi incroyable que cela puisse paraître, elle esquissa une moue qui se révélait être un début de sourire. Peut être se prenait-elle au jeu après tout. Elle tira encore sur sa cigarette et recracha lentement la fumée au visage de Ogada-sensei. Tout sourire disparut, elle répliqua, glaciale:

-Donnez-moi donc un devoir supplémentaire, Ogada-sensei. Par contre, il n'est pas garanti que je vous le rende un jour.

Non parce qu'il était hors de question qu'elle passe son temps à faire des devoirs de biologie toute son année. Elle avait cent fois mieux à faire que ça. Ignorer Makimura par exemple. Bon, ce n'était certes pas un bon exemple. Mais l'idée était là. Elle commençait à être vraiment agacée par l'autorité dont essayait de faire preuve son interlocuteur. L'autorité, il ne l'obtiendrait qu'en même temps que le respect de la jeune fille. Et elle n'était pas prête à lui accorder un quelconque respect. Rien que parce qu'il était venu avec une clope au bec en cours et qu'il lui avait taxé la sienne.

Si Nobuo aimait qu'on lui résiste, il allait être servit. Et encore. Temi tenait sa langue pour le moment. Mais de nature franche et sincère, elle n'hésiterait cependant pas à dire ses quatre vérités à Nobuo, s'il la cherchait. Certainement aussi qu'elle le planterait ici si elle commençait à en avoir marre. Et sans aucune honte. Si elle était fière, elle n'était pas maso non plus. On ne pouvait pas en dire autant de Misaku... Mais c'est là une autre histoire.

La plaisanterie aurait certainement duré plus longtemps si Temi n’avait pas recraché la fumé de sa cigarette dans le visage de Nobuo. Sans vraiment savoir pourquoi, cette réaction plongea le professeur dans une grosse colère. Son sourire s’évapora avec la fumée. La réponse glaciale et insolente de la fille n’arrangea rien. Lutter contre les affreux petits cons qui lui servaient d’élèves, Nobu y arrivait sans problème, lutter contre lui-même c’était plus difficile. Il aurait aimé garder son calme, son sourire goguenard et tout ça, plutôt que de céder à la pression du Nobu viril et adolescent à qui Temi venait de foutre une baffe et qui n’avait pas la moindre envie de se laisser faire par une donzelle aussi culottée soit elle.

Sa main partit comme une flèche empoigner l’avant-bras de Temi, celui qui tenait la cigarette. Il serra fortement son poignée et leva le bras de la jeune fille au dessus de sa tête. Au fond, caché quelque part derrière sa colère, Nobuo s’éclatait, peut-être Temi aussi, qui sait. En tout cas, il prit la décision de ne pas lui foutre la paix pour aucun prétexte que ce soit. Elle allait devenir sa chouchoutte, celle sur laquelle il allait toujours être – au sens figuré naturellement. En tout cas, le Nobu qui serrait le poignet de Temi entre ses mains explosives n’avait pas l’air de s’amuser. Il approcha son visage de celui de la fille, très près, vraiment très prés. Il fut même forcer de faire légèrement basculer sa tête pour que leur nez ne se touchent. Il ne s’y aurait pas pris autrement pour…

« Fais gaffe à ce que tu fais, quand même, ma jolie. »

Le Nobuo professeur estima qu’il avait été un peu loin, quand même. Il lâcha brusquement Temi et fit quelques pas en arrière avant de faire un petit demi tour. Aussi joyeux que s’ils venaient de parler de la pluie et du beau temps – de la pluie qui arrivait, en l’occurrence.

« Bon, j’reconnais que c’est pas cool de t’avoir piqué ta clope. »

Sa voix était chantante et c’était tout juste s’il ne sautillait pas. Il avait bien conscience qu'il paraissait bizarre, mais finalement, ce que les autres pensaient il s'en souciait trés peu.

« Pour me faire pardonner, je t’en offre une. »

Sa main attrapa son paquet de cigarette, il en plaça une entre ses lèvres et tendit le paquet à Temi. Il l’avait laissé gagner la manche du piquage de cigarette, mais c’était reculer pour mieux sauter – si j’ose dire - Nobuo avait déjà prévu une autre épreuve pour sa chouchoutte. Elle n’allait pas la voir venir, celle là !

Temi était contrariée. Très contrariée. Nobuo avait réussi à obtenir ce qu'il voulait, enfin, c'est ce qu'elle supposait, tout du moins. Ses grand yeux violets étaient étrécis par la colère et avaient pris une teinte plus sombre. Pour un peu, ils auraient jetés des éclairs. Si ce n'est plus. Très peu de personnes s'étaient permises de la toucher ainsi. Et très peu recommenceraient. Mais là, il s'agissait d'un prof, et cela se révélait être de l'abus de pouvoir. Bon, elle avait le même professeur de biologie depuis sa première année, mais jusque là, elle n'avait jamais vraiment prêter attention à ce curieux personnage. Il faut dire qu'elle ne prêtait attention à rien, et que depuis cette rentrée, c'était comme si elle s'était réveillée, après un long rêve. Pour elle, il n'avait tout simplement pas exister.

Elle se frotta l'avant bras sans se défaire de son air... passablement énervé. Elle le toisa à nouveau. Et voilà qu'il lui tendait son paquet de cigarette!? Mais elle allait l'étrangler, ma parole! Heureusement, Temi se révélait être une personne qui avait une grande emprise sur elle même. Un contrôle de soit dans presque toutes les situations... Je dis bien presque. Vous pouvez déjà être sur que s'il s'agit de haine ou de passion, elle n'est plus aussi... sûre d'elle et de ses actions. Mais nous en sommes pas -encore- à une telle extrémité en ce qui concerne Nobuo Ogada.

Elle se désintéressa du paquet, ses traits reprenant peu à peu leur éternelle froideur. S'il essayait là de se racheter d'une quelconque façon, ou encore d'amadouer la jeune fille, il se mettait le doigt dans l'oeil. Elle lui en voulait, point barre. C'était perdu d'avance pour le professeur. Enfin, Temi n'écartait pas totalement la possibilité qu'elle se trompait en ce qui concernait les intentions de son professeur. Qui sait? Peut être était-il assez tordu pour s'amuser comme un petit fou dans ce genre de situation... Cette... version des choses ne l'étonna pas plus que ça par ailleurs, et s'il le lui avouait, elle ne sourcillerait même pas tant ça lui paraitrait naturel venant de cet énergumène. Mais où diable Maeda allait-il pêcher ses profs et ses élèves? Il y avait vraiment des questions à se poser sur ce lycée... Si on lui disait que c'était en fait un asile de fou dont tous les malades s'étaient convaincus que les dons existent, elle serait capable de le croire... Parce que, dans ce genre de situation, il y avait de quoi avoir de sérieux doutes.

Mais laissons donc ces théories bancales de côté afin de nous pencher sur l'instant présent. Temi se laissa lestement retomber le long du mur et s'assit par terre. Elle en avait marre de rester debout. Elle tira donc sur sa cigarette et elle leva les yeux vers Nobuo avant de lâcher d'un ton peu amène:

-Et bien, vous me donnerez cette cigarette quand je serai vraiment dans le besoin.

Une panne de clope était quelque chose à toujours prévoir. Et comme ça, elle ne refusait pas la cigarette, mais ne la prenait pas non plus. Un bon compromis pour la lycéenne.

Non ? Nobu avait réussi ! Il avait vu de la colère des yeux violets de Temi lorsqu’il la tenait. Il aurait su apprécier la victoire dans d’autre condition. Mais c’est lui qui avait perdu son calme le premier. Elle avait un regard vraiment terrifiant. Comme quoi, la force peut faire bien des choses. Décidément, il l’aimait bien, la petite Temi. Si seulement ils avaient été camarades au lycée. Ca aurait certainement était…éclatant ? Mais il était trop tard et Nobu se voyait mal draguer une de ses élèves. De toute façon c’était plutôt mal partit. Même lorsqu’il lui tendait son paquet de cigarette, elle avait l’air en colère. Mais quelle petite teigne ! C’est pas grave, il y arriverait de toute façon. Il était bien plus tenace qu’elle…Enfin, il espérait.

« Tu me le rappelleras alors. »

Répondit-il, souriant, à la froideur de Temi avant de s’asseoir à son tour, en face d’elle. Il la toisa quelques instants, sans arrières pensées, ou peut-être avec, qui sait ? Pas Temi en tout cas. Nobuo cessa de la regarder lorsque, pour la deuxième fois, sa cigarette refusa de s’allumer. Il en vint à regretter d’avoir massacré la première et de ne pas avoir reprit la sienne à Temi. Après trois échec consécutifs, il y parvint enfin, tira une longe taffe. Ce fut que lorsque la fumée qu’il recracha disparu dans l’air qu’il brisa enfin le silence.

« Tu as commencé ton exposé sur le machin à plumes là ? »

Il n’arrivait même plus à se souvenir du nom de la bestiole en question. Tant pis. Raah, la nicotine, qu’est ce qu’il ferait sans ça ? Certes, ça le tuait à petit feu, il fallait y penser, mais Nobuo évitait de le faire. Le nom du machin, alors ? Rien à faire, il s’en souvenait plus. De toute façon il s’en fichait. Il tira à nouveau une taffe de sa cigarette toute neuve.

« Bah…Laisse tomber. »

Au cas où un archéoptéryx – ou un machin plus ancien – vienne à passer au-dessus du lycée, le prof de bio leva la tête et regarda le ciel. Mais il ne vit qu’un gros nuage gris.

« Je ferais mine d'avoir oublié... »

Temi s'était calmée. Pas d'exposé? Tant mieux. Elle espérait seulement que Makimura fermerait sa grande gueule, pour changer. Quoi que, elle n'avait pas vraiment de raison de s'inquiéter: il l'ouvrait rarement quand il ne s'agissait que d'elle. Si ça avait été Misaku, cela aurait été une autre affaire. Il n'empêche, un cours à rattraper et un exposé en moins... l'année commençait tout juste et c'était déjà le bordel. Cette fois, Temi ne retint pas son soupir. Preuve peut être qu'elle était un tout petit peu moins... méfiante? Ce n'était pas pour autant que Nobuo avait le champ libre, loin de là! Temi avait un petit côté coriace agaçant, il faut le dire.

Sa clope terminée, elle enleva le peu de tabac à moitié consumé qui restait et s'amusa à faire rouler le mégot entre son pouce et son index. Elle songea rapidement à ce qui venait de se passer. Si elle n'avait pas été furieuse, son coeur aurait surement loupé un battement lorsque leur visage avaient été si près... Elle chassa vite cette pensée de sa petite tête: c'était son professeur, il avait plus d'une dizaine de plus qu'elle. Même s'il en avait pas l'air. Cela n'avait rien de très sain au sens étique du terme. Elle divaguait, et cela agaça Temi qui fronça les sourcils. Cela ne tournait pas rond.

Elle se rendit alors compte qu'elle n'avait même pas adressé un mot de remerciement pour l'exposé à Nobuo. Etait-ce vraiment nécessaire? De toute façon, le professeur aurait bien d'autre ennui: il commençait à pleuvoir. Pourvu pour lui que la cigarette tout juste sortie de son paquet survive! Rien n'était moins sûr cependant, vu les grosses gouttes qui tombaient. Dans une minute, ils seraient trempés jusqu'aux os.

Temi ne savait pas trop ce qu'elle allait faire. Un part d'elle souhaitait rentré histoire de ne pas être trempé et de ne pas s'enrhumer par la suite. Mais la jeune femme aimait bien la pluie et sentir les grosses gouttes tomber sur le haut de sa tête, le froid imprégner ses vêtements et l'eau glisser sur elle. Elle aimait toutes ses sensations... Mais un autre problème se posais. Notre amie a une chemise blanche. Et toute personne sensée -ou pas- sait qu'une chemise blanche trempée n'est qu'une chemise transparente... sur un magnifique soutien gorge rouge en ce quo concerne Temi. Rien de bien discret.

Elle fronça les sourcils, indécise, et ce qui devait arriver arriva. Une deuxième Temi apparut d'abord comme une ombre, puis gagna en opacité, debout à ses côtés. Fichu don. A chaque fois qu'elle éprouvait quelque chose de contradictoire, c'était le même cinéma. Elle s'auto toisa, ennuyée, avant de grommeler:

-Voilà qui est fort ennuyeux...

Temi contrôlait que très mal son don. Enfin, créer un double lui posait pas trop de problème, mais le ramener d'où il venait était une autre histoire... Il y en avait au moins un qui devait être content: à la place d'une jeune fille aux yeux violets et au caractère agaçant, il en avait deux. La belle affaire, non?

Il ne tarderais certainement pas à se mettre à pleuvoir, constata Nobuo en voyant la tête des nuages. Si Temi aurait été un nuage, elle aurait eu cette là. Non elle était un peu plus mignonne quand même…Mais n’importe quoi ! A quoi tu penses, Nobu ? Il secoua un peu la tête pour chasser la pensée qui venait de s’y installer. Il posa les yeux sur Temi, confirmant ce qu’il venait de se dire. Pas la peine de dire qu’il fut agréablement surpris lorsqu’elle soupira. Enfin ! Une autre preuve qu’elle n’était pas complètement inhumaine. Nobuo s’abstint de faire tout commentaire, mais l’expression qu’il affichait sur son visage parlait pour lui.

Les yeux turquoise du professeur continuèrent de se promener sur la jeune fille, elle semblait perdue de ses pensées. Dans sa jeunesse, Nobu avait eut pas mal de petites copines, des histoires sans lendemain, c’était plus pour satisfaire ses envies d’adolescent qu’un réel désir de fonder une famille. Même à présent, Nobu s’imaginait très mal père de famille. Rentrer tous les soirs, embrasser sa petite femme qui lui aurait préparé de bons petits plats, écouter ses marmots raconter leurs histoires, … Non, merci. En étant prof, finalement, il s’était isolé du risque de tomber trop amoureux et de finir comme ça. Les prof étaient généralement sérieuses et chiantes – pas du tout son genre – quand aux élèves, Nobu s’efforçait de les considérer comme des gamines. Alors, pourquoi diable s’était-il approché si prêt de Temi ? Sur le coup, la colère avait été plus forte, mais tout de même, il avait eut envie, pendant une fraction de seconde, de poser ses lèvres sur celles de Temi. La pluie l’aida à revenir à la raison … et à arrêter de fumer aussi.

Les grosses gouttes qui tombaient arrêtèrent en moins de deux sa cigarette toute neuve. Nobu lâcha quelque chose comme « M*rde » entre ses dents. Il fourra la clope foutue dans le fond de sa poche de pantalon. Le pire, dans l’histoire, c’est qu’il avait une chemise blanche, et généralement, les chemises blanches, quand c’est mouillé ça devient transparent. Nobuo s’apprêtait donc à proposer à son élève de rentrer, quand il se rendit compte qu’elle avait elle aussi une chemise blanche. Un sourire – qui voulait dire ce qu’il voulait dire – prit forme sur le visage du professeur. Il se surprit à se demander ce qu’il allait bien pouvoir voir s’ils restaient trop longtemps sous la pluie. Il est certain qu’il s’en aurait voulu d’avoir eu une telle pensé si Temi ne s’était pas amusé à se dédoubler. Les filles de nos jours… Nobuo posa un regard amusé sur chaque Temi, avant de ricaner. C’est vrai qu’elle ne contrôlait pas son don, elle était là pour ça, de toute façon. Il cessa vite de ricaner, histoire de ne pas avoir deux fois plus d’emmerdes. Non, c’était trop bon, il continua de se marrer. Deux Temi, donc deux fois plus de devoirs supplémentaires, deux chemises blanches mouillées et donc deux fois plus de…enfin bon. Il chassa ses pensées perverses et cessa quelques instant de rire pour demander, avec un large sourire.

« Bon, les filles, on fait quoi maintenant ? »

Il recommença à rire quelques secondes après. C’était pratique, ça pour sécher les cours. Pas envie d’aller en bio ? Un petit dédoublement et hop ! Une va en bio l’autre va fumer une clope sur le toit. Ca permet aussi d’avoir deux copains sans qu’ils ne le sachent. Pourquoi Nobu n’avait-il pas un don pareil ? Il parvint tout de même à se calmer. Il toussa, histoire de retrouver sa classe naturelle – ahem – regarda successivement les deux Temi et demanda à celle, qui, selon ses souvenirs, était la vraie.

« Comment on la ramène d’où elle vient ? Une Temi, c’est déjà trop ! »

Bien qu’il avait l’air un peu plus sérieux, il avait le plus grand mal à faire disparaître son large sourire un poil moqueur. Il espérait qu’aucune des deux Temi ne prenne mal sa réflexion.

Temi se renfrogna -même si elle en montra pas grand chose, si ce n'est qu'un énième froncement de sourcil. Ce prof se payait sa tête. Son don n'avait rien de bien pratique. Il était totalement hors de contrôle même. Si en apparence, Temi semblait s'être réellement dédoublée, elle ne faisait qu'avoir un contrôle sur le temps. Le problème, c'est qu'elle ne savait jamais quel était l'instant ou elle était retournée dans le passé ou s'était projetée dans le futur afin d'être deux... Ciel! Que c'était compliquée. Réunir Temi en une seule était compliqué, vu qu'elle devait pensé avec deux têtes et ce sur des évènements passés et futurs.

Peu encline à expliquer le pourquoi du comment à son professeur, Temi -l'originale- lâche d'un ton glacial:

-On ne la ramène nulle part. On la supporte point barre.

C'est que ce n'était pas une partie de plaisir non plus pour Temi qui s'entendait penser à deux endroits à la fois. Pas pratique du tout. Parce que s'il y avait deux corps différents, il n'y avait qu'une seule et même conscience. Elle était partie pour avoir une bonne migraine. Si beaucoup de gens trouvaient pleins d'avantages, on ne pouvait pas en dire autant pour Temi. A chaque fois qu'elle se dédoublait -trop souvent d'ailleurs, elle devait se casser la tête pendant des heures pour que tout redevienne à la normale... Une fois, elle s'était ''divisée'' trop longtemps, et quand elle avait retrouvé son état normal, elle avait perdu connaissance. Le 'choc mental' avait été conséquent.

Temi chassa ce mauvais souvenir. Elle pouvait plus aisément retrouver son intégrité depuis qu'elle étudiait ici. Encore heureux, sinon, elle serait déjà partie. Une chose était sure, elle ne pourrait pas se concentrer tant que Ogada était dans les parages. Mais elle se voyait mal lui avouer l'effort qu'elle aurait besoin de faire pour que Temi numéro deux disparaisse.

Elle se laissa donc trempée par les grosses doutes qui tombaient du ciel. Après tout, tant pis si sa chemise devenait transparente. Cela apprendrait la vie à Ogada-sensei. Après tout, il s'agissait d'un professeur, et par conséquent il devait savoir faire face à ce genre de situation de façon... enfin, comme se devait faire tout professeur digne de ce nom et désireux de garder son poste.

Au fond, Nobu se fichait un peu de savoir comment ramener l’autre Temi d’où elle venait, il y avait plus urgent. Il pleuvait de grosses gouttes d’eau, elles glissaient sur les cous des deux jeunes filles et collaient leur chemise blanches sur leur peau. Nobuo commençait même à voir les soutien-gorges rouges à travers. Il se mordit la lèvre inférieure et cessa se força à regarder les yeux de la Temi qui avait parlé, avec autant de mauvaise humeur que d’habitude, ce qui lui arracha un soupir de lassitude. Elle était chiante à être toujours sur la défensive comme ça. Il préféra retourner dans sa contemplation peu discrète de sa poitrine que de répondre quoique ce soit. Déjà parce qu’il avait la flemme et en plus parce qu’il doutait que Temi prenne la peine de lui répondre. Elle était vachement bien foutu pour une adolescente…

Ahem. Bon. Nobuo se leva et épousseta rapidement son jean. Temi était une gamine et lui un vieux, ils n’avaient rien à faire ensemble et si Temi surprenait son regard, elle était bien capable de lui causer des problèmes, il n’avait plus l’âge de mater les adolescentes, m*rde. Il s’autorisa tout de même un dernier coup d’œil au soutien-gorge qui le narguait avant de se concentrer sur les yeux du visage de Temi.

« Vous…’fin Tu vas être malade, vaut mieux qu’on rentre. »

Vaut mieux aussi que tu mettes un pull, ce garda t-il d’ajouter. Un dernier regard, plus furtif, au rouge qui se voyait très bien sous la chemise d’une des deux Temi, et c’est avec une once de regret que Nobu se dirigea vers la porte qui permettait de descendre du toit. C’était mieux comme ça, de toute façon. Il avait intérêt de se trouver une copine de son âge pronto, sinon il allait finir par violer une de ses élèves, il avait déjà trouvé laquelle…Il appuya sur la poignée.

« Non… »

La porte ne s’ouvrait pas. Il appuya une deuxième fois, poussa, tira, rien n’y faisait. La porte refusait de s’ouvrir. C’était pas son jour, ou si, enfin, ça dépendait du point de vue. Sa main glissa de la poignée et Nobuo lâcha un autre soupir, il se tourna vers les deux Temi, en tentant de ne pas baisser les yeux sur les douces poitrines. Il était vraiment en manque, depuis combien de temps il ne l’avait pas fait ? Mais n’importe quoi ! Ressaisis-toi vieux.

« On est…coincés. »

Finalement, c’était plutôt de la joie qu’il ressentait. Qui ne serait pas heureux de se retrouver coincé sur un toit avec deux filles parfaitement identiques qui portaient un magnifique soutien-gorge rouge sous leur chemise un jour de pluie ? Nobuo s’assit à côté de la porte. Son regard se posa naturellement entre la gorge et le ventre de l’une des Temi. Il regardait juste, il faisait rien de mal. Et puis, il ne l’interdisait pas de regarder son torse à lui.

Temi numéro un se leva excédé. Elle espérait que ce n'était qu'une mauvaise blague. Après avoir jeté un regard à son double, elle marcha droit sur la porte. Fermée. Elle s'acharna sur la poignée, mais cela ne donna rien. Si Misaku avait été là, elle y aurait mis un bon coup de pied et fini mes ennuis. L'ancienne Ookami ne se doutait certainement pas qu'elle manquait autant à son amie en cet instant. Elle devait certainement se prendre la tête avec quelques hurluberlus du comité.

N'ayant rien relevé sur les regards déplacés du professeur mais ne les ignorants pas non plus, elle croisa les bras sur sa poitrine avant de se retourner vers lui. Il fallait avouer qu'elle avait de la chance qu'il ait mis une chemise blanche. Elle devait l'avouer, pour un vieux, il était pas mal... Pas mal du tout, même. D'ailleurs, s'il pouvait se retourner et se mettre dos à elle, elle pourrait juger de sa chute de reins. Très important.

Temi plissa des yeux, son double se trouvant derrière Ogada.Contrairement à ce qu'elle avait pensé, ce n'était pas son indécision qui l'avait poussée à se dédoubler. C'était cet instant-ci. C'est bon, maintenant qu'elle s'était rincée l'oeil, son double allait pouvoir disparaître. C'était bien la première fois d'ailleurs que c'était si rapide. Peut être contrôlait-elle mieux son don qu'elle le pensait, finalement. Temi numéro deux, une Temi du futur, finalement, disparut avec un sourire en coin. Voilà une bonne chose de faite.

Toujours adossé à la porte de sortie qui ne s'ouvrirait probablement pas, les bras croisés histoire de garder un semblant de dignité. C'est que le prof n se gênait pas. Elle non plus, en même temps... Mais passons et oublions le début d'esquisse d'un sourire qui avait fleurit sur les lèvres de Temi.

C'est d'un ton neutre qu'elle demanda à Nobuo:

-C'est bien joli, tout ça, mais on fait quoi, maintenant?

Trempée jusqu'aux os, sa jupe d'uniforme décidément trop courte et sa chemise plus blanche du tout qui lui collait au corps, des mèches de cheveux plaquées sur son visage, des gouttes d'eau accrochées à ces cils, Temi ne rêvait que d'une chose: un bon lit chaud et douillet... Elle se demanda d'ailleurs si ce n'était pas... déplacé de penser à un lit dans une telle condition. Nobu, un avis sur la question?

Le sourcil droit arqué avec une pointe d’incompréhension moqueuse dans le regard, Nobuo observait, amusé, la petite Temi s’acharner sur la porte. Il ne fit cependant aucun commentaire, encore une fois, le turquoise qui brillait dans ses yeux était bien plus parlant. Il eut le plus grand mal cependant à cacher sa déception lorsqu’elle croisa les bras, lui cachant ainsi la vue. Il en profita pour sonder le visage de la jeune fille. Nobu était si absorbé qu’il n’avait pas remarqué que la deuxième Temi était derrière lui, il n’y avait pas tellement fait attention, à vrai dire. Aussi il ne se rendit pas compte que la Temi du futur avait disparu, ni de la véritable raison pour laquelle elle était apparue.

Il sourit à nouveau, en entendant la voix de Temi sans aucune pointe d’agressivité. On aurait presque dit une adolescente comme les autres. C’était peut-être ce qui la différencier des gamines de son âge qui plaisait à Noubo. Plaisait ? Plus il la regardait, plus il se disait qu’il avait vite intérêt à ne plus jamais se retrouver seul avec elle, il allait finir par faire une c*nnerie, à force. Il ne se rappelait pas, en trois ans, avoir été attiré comme ça par une élève. Il n’était pas sûr que Maeda lui pardonnât un tel écart de comportement.

Nobuo, pour éviter de penser à tout ça, surtout qu’il se voyait mal avoir une quelconque relation avec Temi, se retourna dans l’espoir d’apercevoir le double. Il fut surpris quand il ne le vit pas. Tant mieux, il avait déjà du mal avec une…Il commençait à avoir froid, et Temi cachait ses avantages, il n’avait plus vraiment de raisons d’avoir envie de rester sur le toit. Il rêvait, lui aussi, d’un bon lit, avec une bonne couverture et une bonne paire de…d’oreillers. Nobuo se mit en face de son élève, sans trop savoir ce qu’il faisait, il posa ses deux mains sur chacun des bras de Temi, poussa légèrement. Comment aurait-il pu deviner que la porte déciderait de s’ouvrir à cet instant là ? Surpris, il tenta vainement de retenir la pauvre Temi qui finit par l’entraîner dans sa chute et ils dévalèrent l’escalier ensemble.

Temi n'eut même pas eu le temps de se demander ce que Ogada faisait. Par contre, elle ne cessera pas à l'avenir, de se demander ce qu'il voulait faire... Elle aurait bien le temps de se torturer les méninges plus tard. Plus tard, parce qu'à sa grande surprise, la porte céda. Pourquoi est ce qu'elle s'était ouverte, c'te p*tain de porte? Temi partait en arrière, entrainant le professeur de biologie dans sa chute.

Chute qui, malgré la longue descente brutale de la première volée de marches dans un roulé boulé plutôt bruyant, ne s'avéra pas si douloureuse que ça. Certainement plus pour elle que pour Nobuo d'ailleurs, puisqu'elle avait atterrit sur le dos, en bas des marches... Tandis que Ogada était sûr elle. Position certes embarrassante mais pas déplaisante. Temi, ne se laissa d'ailleurs pas le loisir de rougir, se contentant d'essayer de se remettre les idées en place. Il y avait un bon point dans tout cela. Il étaient si proches que son magnifique soutien gorge rouge n'était pas visible. Rappelons par contre que nos deux amis sont tout de même trempés et que les tissus leur collaient à la peau. Quelque peu inconfortable non?

Ce n'était pas pour autant que Nobuo se décidait à bouger. Allez savoir ce qui lui passait pas la tête à cet hurluberlu. Temi, fidèle à elle même, profita de la situation. Elle susurra à l'oreille de son professeur, non sans cacher sa malice -pour une fois qu'elle n'essayait pas de rester neutre...

-Suis-je sensée me sentir honorée, Ogada-sensei?

Bien sûr, pas question d'oublier les titres, même dans ce genre de situation. Cela peut être très mal pris. Si elle avait su que leur rencontre se terminerait ainsi, elle aurait chercher les ennuis à ce prof plus tôt!

[désolée, c'est très couurt >_<]

Difficile de dire à quel point Nobuo fit surpris lorsque la porte céda brusquement et que la gravité les traîna tout deux du haut de l’escalier. C’était le genre de choses qui arrivaient plutôt rarement et qui provoquait des sensations fortes dont le professeur raffolait. C’était un peu comme tenir un gros pétard entre ses mains le plus longtemps possible et le lâcher juste avant qu’il n’explose. Le genre de choses complètement délurées mais dangereuses qu’il faisait durant sa jeunesse. Les roulades dans les escaliers lui évoquaient certes de vieux souvenirs mais c’était bien la première fois qu’il s’amusait ainsi avec une fille, même si rien de tout cela n’était prévu. N’allez pas croire qu’il éprouvait une quelconque satisfaction dans la souffrance, bien au contraire, c’était le risque qui lui plaisait. De toute façon, Nobuo n’éprouva qu’une moindre douleur, il fut cependant inquiet, l’espace d’un instant pour Temi qui avait atterri sur le dos. Mais elle semblait aller bien, aussi Nobu pensa que se relever immédiatement n’était pas primordial.

Il en profita donc un peu, qui ne l’aurait pas fait à sa place ? Ils étaient si proches l’un de l’autre que le soutien-gorge de la miss n’était plus visible. Si proches que les gouttes d’eaux qui dégoulinaient des cheveux blancs de Nobuo tombaient sur le front de Temi…La position avait beau être embarrassante, elle était loin d’être inconfortable et encore moins déplaisante. Certes, Nobu était trempé, sa chemise et son jean mouillés et glacés lui collaient à la peau, rendant n’importe quel mouvement difficile. Un sourire malicieux naquit sur son visage lorsque Temi vint lui demander dans le creux de son oreille si elle devait se sentir honorée. La réponse coulait de source. Son professeur plongea ses yeux turquoise dans les siens et murmura

« Evidemment. »

Son sourire grandit encore. Nobuo baigna dans les iris violets de Temi. Il était rare que Nobuo réfléchisse avant d’agir, il se laissait guider par son instinct, ignorant tout ce qui pouvait le retenir, la morale, les lois, finalement ce n’étaient qu’un ramassis de conneries. Dans la nature, il n’y avait ni morale ni lois, sauf celle du plus fort. Et actuellement le plus fort, c’était lui.

Les yeux toujours plantés de ceux de son élève, Nobuo réduit encore l’espace qui les séparait, jusqu’à ce que leur nez se touchent. Son sourire grandit encore. Dans un sens, il était bien content que Temi ait le don d’ubiquité à la place de celui de lire dans les pensées ou une autre saleté. Il n’aurait pas aimé qu’elle sache ce qu’il avait dans la tête à cet instant. Après quelques petites secondes encore pendant lesquelles il sonda les grand yeux de la jeune fille, Nobuo pencha un peu la tête, ferma les yeux et vint déposer un baiser contre les lèvres de Temi.

Si Temi n'avait pas été Temi, elle aurait certainement écarquillé les yeux de surprise ou manifesté son étonnement. Mais non, nous avons bien une Temi maître d'elle même... Et visiblement sûre de qu'elle voulait. Savourant le contact, elle laissa sa main se loger à la base de la nuque de son professeur de biologie. Pourquoi diable avait elle des papillons qui semblaient danser dans son estomac? Elle avait l'impression qu'on l'embrassait pour la première fois, ce qui la laissa d'ailleurs perplexe...

Etait-ce pour cette raison que qu'elle mit fin à l'échange? Elle n'en savait trop rien. Il s'empêche qu'elle repoussa le charmant Nobuo et se releva. Elle remit de l'ordre dans sa tenue, ébouriffa ses cheveux dans l'espoir vain de leur donné ne serait-ce qu'un petit peu de volume, puis elle fit un effort pour reprendre son éternel air froid -et ne pas paraître désorientée. Désormais, seule ses prunelles violettes étaient encore marquées par ce qui venait de se passer.

C'est donc la Temi ordinaire, froide et insensible -tout du moins e apparence- qui s'adressa à Nobuo:

-Voilà qui est bien peu raisonnable.

Voir pas raisonnable du tout. Mais elle se garda bien de le dire, elle serait bien triste que cela ne se reproduise pas. De nature prudente, la jeune fille se doutait cependant que cela ne mène pas à grand chose, voire à une catastrophe. D'autant plus qu'elle ne voulait pas être renvoyée du lycée. Cela pourrirait ses chances. Bien qu'elle ne douta pas du fait que Ogada garderait ça pour lui -quoi qu'elle le voyait très bien le gueuler sur tout les toits...-, ce qui ne l'empêcha pas de se dire que les risques étaient bien trop important... Elle chassa tout ça de sa petite tête: on était loin d'en être là. Après tout, ce n'était qu'innocence, et ce sans témoin...

Ce n’était bien évidemment pas la première fois que Nobuo embrassait une femme, mais ce fut tout comme. Il n’avait jamais ressentit ça avant. Les yeux fermés, il savourait le contact des lèvres sucrées de la jeune fille née une quinzaine d’année après lui. Et alors ? Qu’est ce que ça faisait ? Il s’en foutait après tout, enfin, pour le moment. Il aurait bien fait duré le baiser, des heures entières, tout le reste de sa vie pourquoi pas ? Mais Temi n’était visiblement pas de cet avis. Ce qu’elle pouvait être chiante. Avec un effort qui lui sembla insurmontable, Nobu adopta une attitude neutre et un sourire un poil moqueur, il ne pouvait cependant pas cacher l’éclat de déception qui brillait dans le turquoise de ses yeux.

Pendant que Temi se levait, Nobu s’assit sur la dernière marche. Il avait envie d’une cigarette, histoire de se pourrir un peu plus les poumons et de Temi aussi. Ses yeux fixaient la jeune fille avec une avidité à peine dissimulée. Cependant, le regard du professeur se durcit à la remarque de son élève. Elle avait raison, c’était même pire qu’irraisonnable. Un adulte responsable, quelque part dans Nobuo le conjura de s’excuser auprès de cette jeune fille et de faire comme si rien ne s’était passé. Il aurait été naïf de songer que Nobuo fasse une chose pareille. Il avait vaguement pensé à planter Temi là et à s’en aller, il n’était si lâche…et surtout il crevait d’envie de recommencer.

« T’as raison… »

Le professeur de biologie lâche un soupire. Il risquait d’avoir des problèmes avec la loi, à ce train là, d’aller en prison, ou pire, de se faire renvoyer. Son regard se perdit quelque part contre le mur. Depuis qu’il était prof, Nobuo s’était pris d’affection pour se métier, pour les élèves – pas au point de les embrasser après avoir dévalé un escalier – quoiqu’il en soit, il ne se voyait plus faire autre chose. Ca lui plaisait, c’était son truc maintenant. Un regard aux environs, il n’y avait personne, pas de témoins…

Avant de se lever, Nobu s’étira et s’approcha ensuite de Temi. S’il n’y avait pas de témoins, il n’y avait pas d’ennuis. Il ne pensait pas que Temi avouerait ce qui s’était passé et même si elle le faisait, qui la croirait sans preuves ? Pas grand monde…Aussi, c’est sans inquiétude que Nobuo posa ses mains sur les hanches de la jeune fille, rapprochant encore son visage du sien, il lui murmura à l’oreille.

« Mais qui saura ? »

Sans attendre une quelconque réponse, Nobuo ne laissait jamais le temps aux autres de lui répondre. Il baissa la tête et déposa un chaste baiser sur les lèvres de Temi, trop rapide pour qu’elle ait le temps de faire quoique ce soit.

« Tu en as autant envie que moi, pas vrai ? »

La question était un peu idiote, parce qu’au fond, Nobu redoutait que Temi ne lui réponde pas ce qu’il espérait. Il mourrait d'envie de l'embrasser à nouveau, rien qu'une fois... M*erde, il devait sentimental maintenant. Elle allait le rendre fout.

Autant envie? Oh que non, certainement bien plus. Mais Temi aimait le jeu du chat et de la souris. Elle préférait être le chat, bien entendu, mais ça ce n'est pas gagné. Elle reprit donc son air le plus sérieux et attrapa la cravate mal mise de Nobuo. Elle entreprit dans un premier temps de la lisser entre ses doigts fins, puis la remit correctement, resserrant le nœud. Pas un point d'étrangler Nobuo, non plus! Juste histoire de lui faire comprendre qu'il se devait être un peu plus correct. Bien sûr, elle ne tenait pas du tout à ce qu'il le soit. Jouer, c'était d'abord se contredire soit même, non?

D'une voix à nouveau neutre, la mine concentré sur la cravate, elle le réprimanda:

-A se demander pourquoi vous êtes profs, Ogada-sensei.

A se demander aussi pourquoi elle était élève aussi... Mais passons. Sans lâcher le bout de tissus, elle se hissa sur la pointe des pieds, et s'approcha à quelques millimètres des lèvres si tentantes de Nobuo. Ses prunelles violentes se replantèrent dans le turquoise de son vis à vis, et elle ne pu s'empêcher de sourire de satisfaction. Heureusement, ils étaient trop prêt pour qu'il puisse le voir. Cela aurait tout gâcher. D'un ton plus suave, elle ajouta, son souffle caressant Nobuo:

-Vous auriez été autre chose qu'un prof, ou moi autre chose qu'une élève, ça aurait été moins excitant, non?

Comment ça, de la provocation gratuite? Ben, il fallait bien s'amuser un peu non? Et puis, elle n'avait pas tord: les relations entre pions et élèves ou entre pions et profs étaient bien mieux vues que les relations élèves-profs. Ou encore, il aurait pu être simple cuistot ou encore quelqu'un de l'extérieur... Cela aurait été moins problématique. Un peu moins drôle aussi.

Résistant finalement à la délicieuse tentation, Temi laissa ses talons retrouver le sol, tout sourire disparut. Elle espérait seulement que le prof ne lise pas dans les pensées, ça serait vraiment pas intéressant! Cela gâcherait tout même. Voluptueuse, elle recula d'abord d'un pas, sans se défaire du regard turquoise. Puis un deuxième. Enfin, sans un mot, elle se retourna et dévala les escaliers, plantant Nobuo là.

L'année promettait d'être riche en jeux. L'idée effleura Temi qu'elle était peut être pire que Kido. C'est d'ailleurs pour ça qu'elle devait s'empresser de lui raconter, surtout que son amie était bien plus expérimentée dans la pratique. La preuve, elle faisait toujours tourner en bourrique Makimura. Mais il le lui rendait bien aussi. Ces deux là étaient un peu des cas en la matière. Surement les pires du lycée.

Temi quitta enfin le bâtiment en direction des dortoirs, ou l'affreuse gamine devait déjà se trouver. Puis elle irait à la cafet', fumerait quelques clopes, prendrait une douche. Tafferait un peu aussi. Peut-être. Et elle était intimement convaincue que le professeur de biologie hanterait ses pensées, jusqu'à dans son sommeil. On se demande pourquoi...

Il cru fondre lorsque Temi prit sa cravate mal mise entre ses doigts. Ses yeux se détachèrent du doux visage de la gamine pour se poser sur ses mains qui lissaient le morceau de tissu bleu. Nobu faisait des efforts louable pour s’empêcher de lui sauter dessus, il fallait reconnaître que les escaliers n’étaient pas le meilleur endroit pour … Malheureusement pour lui, Temi ne lui arracha pas sa cravate mais se contenta de la resserrer. Nobuo détestait cette façon si conventionnelle de mettre les cravate, c’était tout sauf cool. Pourquoi il était prof ? La question, en effet, Nobuo se la posa. Ce n’était certainement pas pour se taper ses élèves – pas à la base en tout cas – ça lui plaisait bien comme métier, ça lui rappelait sa jeunesse. Elle n’était pas si loin que ça, d’ailleurs.

S’il était trop vieux, elle ne se serait pas approché si prés comme elle était en train de le faire. Heureusement pour sa fierté, Nobu était trop absorbé par les yeux de Temi pour fermer les siens. Il l’aurait fait sinon, persuadé qu’elle l’embrasserait. Mais elle ne le fit pas, elle parla. Le désavantage avec les filles…Excitant ? C’était le mot. Temi avait raison mais ça n’empêchait pas Nobu de commencer à être agacé par le petit jeu de la fille. Elle n’avait pas tord, parce que l’adrénaline qu’il ressentirait après, savoir si oui ou non elle parlerait, où ce qu’ils venaient de faire les mènerait. Il avait presque hâte qu’elle soit partie pour avoir le loisir de laisser un tas de sentiments contradictoires le ronger. Presque seulement, parce qu’il avait l’impression qu’elle allait lui manquer. Finalement, Temi se baissa, tuant l’espoir du baiser que Nobuo attendait. Il aurait sûrement très vite une autre occasion de l’embrasser.

Temi reculait. Nobuo arqua un sourcil, qu’est ce qu’elle faisait ? Un autre pas en arrière. Il eut l’impression de comprendre, et ce qu’elle fit ensuite le lui confirma. Il ne pu s’empêcher d’être surpris. Il la regarda dévaler les escalier, lorsqu’elle eu disparu de son champ de vision, la surprise céda à l’amusement. Il lui ferait payer cette fuite, elle n’avait pas fini de penser à lui, avec tous les devoirs qu’il allait lui coller. Des recherches, des dissert’, des synthèses, elle n’avait pas fini de faire de la bio.

Nobuo fuma une dernière cigarette en pensait avec un sal sourire à tout ce qu’il allait donner à faire à la pauvre Temi. Il s’éloigna ensuite du toit pour se diriger vers la salle des profs. Cette année, il allait vraiment beaucoup s’amuser.